Quand une voiture dans la nature offense le regard du juge
On croyait que les fumeurs étaient seuls l'objet de l'ostracisme des associations, mais voilà que l'automobile dérange à son tour. C'est en tout cas la conclusion que l'on peut tirer à la suite d'une décision de justice pour le moins zélée. Le juge des référés de Nanterre a en effet condamné Toyota à supprimer dans un délai d'un mois des photographies et des vidéos publicitaires. Que leur reproche-t-on ? De représenter des véhicules stationnés ou circulant en milieu naturel. Voilà toute l'étendue de l'offense faite au public.
Saisi par l'association France Nature Environnement (FNE), le juge a estimé que la diffusion de ces photos et vidéos constituait "un trouble manifestement illicite". Il a, en conséquence, condamné le constructeur automobile japonais à supprimer, dans le mois qui suivra la signification de la décision, "toute publicité représentant des véhicules installés dans le milieu naturel en dehors des voies de circulation", et ce, "sous astreinte de 100 euros par jour et infraction constatée".
Ce qui n'est pas admis, un Land Cruiser posé sur des rochers
Diffusés depuis près d'un an, les clichés et vidéos incriminés représentent trois modèles de véhicules - Land Cruiser, Hilux et Rav 4 - stationnés ou circulant sur une plage, sur des espaces rocheux, des étendues de sable, de terre ou d'herbe, ou traversant des étendues d'eau. Une violation de la loi, si ce n'est un crime, selon le juge qui s'est saisi avec célérité de cette affaire urgente. Plutôt piquant lorsqu'on sait l'antériorité de l'engagement de Toyota en matière de voitures non polluantes, la Prius, sa première hybride, remontant à... 1997.
Ce qui est toléré, un Land Cruiser sur un macadam tout juste visible
Consulté par Auto-Addict, Toyota montrait son étonnement devant cette décision et se bornait à commenter la méthode de prise de vues de ce type de campagne. "Nous sommes extrêmement prudents sur ces scènes filmées en pleine nature, dit Philippe Boursereau, directeur de la communication. Tellement que, parmi nos règles, la voiture doit toujours avoir les quatre roues en contact avec une route goudronnée. Vue de profil, avec un peu de recul, cela peut au premier coup d'oeil donner l'illusion que la voiture évolue en dehors, mais un trait de goudron est toujours apparent sous les roues. Au-delà de cela, et voulant respecter l'environnement, nous déposons avant le tournage ou la prise de vues le scénario auprès des autorités compétentes." Mieux que cela, il est arrivé à Toyota de simuler en studio des décors naturels afin de ne pas agresser le moindre brin d'herbe.
Ce qui est autorisé, un Land Cruiser sur la route
Cela n'a manifestement pas été suffisant pour la FNE et le juge des référés de Nanterre qu'elle a saisi et qui expose ceci : "En laissant croire au public que la possession de ce type de véhicule vaut permis de tout faire dans la nature, la diffusion de ce type de publicité fait, d'évidence, la promotion de comportements contraires à la protection de l'environnement et à la préservation des ressources naturelles." Dans une décision du 9 décembre 2011, le Jury de la déontologie publicitaire (JDP) avait également estimé que ces publicités renvoyaient à des comportements contraires à la protection de l'environnement et à la préservation des ressources naturelles et demandé à Toyota de les faire cesser. Peine perdue, la lenteur de la justice est telle que Toyota a retiré la plupart des photos et vidéos de... son site commercial voir le site. Ne restent que d'innocentes animations Flash en cours de changement.
Naturellement (sic), et malgré cette décision, on ne reprochera pas aux véhicules visés, peints aux couleurs des pompiers, de la protection civile, voire des Eaux et forêts, de venir vous porter assistance à l'écart des voies de communication. Si, en revanche, c'est un particulier avec un 4 x 4 aux couleurs anonymes, qu'il passe son chemin, on attendra les secours officiels.
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